Le chapitre en question est le chapitre 32, il s'intitule LA VOIX DANS LES ARBRES.
Et quand la voix dans les arbres se fait entendre, on retrouve une chanson bien connue :
Tout à coup, du milieu des arbres qui se dressaient devant nous, une voix s’éleva, maigre, aiguë et chevrotante, et chanta ce refrain familier :
Ils étaient quinze matelots
Sur le coffre du mort,
Quinze loups, quinze matelots,
Yo-ho-ho ! Yo-ho-ho !
Voici toute la partie qui contient les instructions utiles :
Le courage leur revenait à vue d’œil et déjà toutes les figures reprenaient leur couleur ordinaire. En quelques secondes, ils se furent remis à bavarder, quoique s’arrêtant de temps à autre pour écouter. Bientôt, n’entendant plus aucun bruit, ils prirent leurs outils et toute la bande repartit, Merry en tête, la boussole en main pour rester en ligne droite avec l’île du Squelette. Il avait dit vrai : personne ne s’inquiétait de Ben Gunn ; mort ou vif, c’était tout un… Seul, Dick tenait encore sa Bible et jetait autour de lui des regards effarés. Mais il ne trouvait aucune sympathie chez ses camarades, et Silver le plaisanta même sur ses précautions.
« Je t’avais bien averti que tu gâchais ta Bible, lui dit-il en ricanant. Puisqu’elle n’est même plus bonne pour prêter serment, que diable veux-tu qu’en pense un esprit ?… Il s’en moque comme de ça !… »
Et il s’arrêta sur sa béquille, pour faire claquer ses gros doigts.
Mais Dick ne voulait pas être consolé. Je m’aperçus bientôt que le malheureux avait peine à se tenir sur ses jambes. Activée par la chaleur, la fatigue et l’épouvante, la fièvre, annoncée par le docteur Livesey, s’emparait manifestement de lui. Heureusement pour le pauvre diable, il faisait bon marcher sur ce plateau découvert et tapissé de mousses, où les pins, grands et petits, poussaient loin les uns des autres, mêlés à des bouquets d’azalées et de canneliers. Poussant droit au Nord-Ouest, nous nous rapprochions de plus en plus de la croupe de la Longue-Vue ; à notre gauche, ma vue s’étendait maintenant sur cette baie orientale où, la veille au matin, je m’étais éveillé tremblant et secoué dans la pirogue.
Le premier des grands arbres atteint, on releva sa position et l’on reconnut que ce n’était pas le bon. Il en fut de même du second. Le troisième s’élevait à plus de deux cents pieds de haut sur un taillis épais : c’était un véritable géant du règne végétal, qui dressait dans les airs son énorme colonne rougeâtre, surmontée d’un parasol à l’ombre duquel un bataillon aurait manœuvré à l’aise. Il devait se voir de loin, aussi bien de l’Est que de l’Ouest, en pleine mer, et il aurait certes pu être marqué sur la carte comme point de repère.
Mais ce n’était pas sa hauteur qui impressionnait le plus vivement mes compagnons : c’était la pensée que sept cent mille livres en or se trouvaient quelque part enterrées sous sa grande ombre. Cette pensée finissait par leur faire oublier toutes leurs terreurs. À mesure qu’ils se rapprochaient du but, je voyais leurs yeux s’animer, leur pas devenir plus léger et plus élastique. Silver lui-même sautillait plus vivement sur sa béquille, en grommelant contre les pierres qui gênaient sa marche ; ses narines frémissaient : il jurait comme un païen s’il arrivait qu’une mouche se posât sur sa large face ou sur son front ruisselant ; par instants, il tirait avec fureur sur ma laisse et, se retournant alors, me jetait un regard meurtrier. Soit qu’il ne se donnât plus la peine de cacher ses pensées, soit qu’elles se fissent jour malgré lui sur son visage, je les lisais comme dans un livre. En arrivant près de cet or, je le voyais bien, tout le reste était oublié : l’avertissement du docteur, comme ses promesses. Sans doute il espérait s’emparer du trésor, retrouver l’Hispaniola, s’y embarquer après avoir coupé toutes les gorges honnêtes de l’île, et s’enfuir comme il l’avait rêvé, chargé de richesses et de crimes.
Sous le poids de ces alarmes, il m’était malaisé de me maintenir au pas de ces avides chercheurs d’or ; à tout instant je trébuchais, et c’est alors que Silver tirait si rudement sur la corde et m’adressait ces regards terribles. Dick venait le dernier, accablé par la fièvre et se traînant à peine. Sa vue même ajoutait à mon malaise, et, pour comble, j’étais hanté par la pensée de la tragédie qui s’était jadis passée sur ce plateau, quand ce hideux pirate à la face bleue, celui qui était mort à Savannah en hurlant pour demander à boire, avait de sa propre main immolé ses six complices. Ce bosquet, si paisible aujourd’hui, avait donc retenti des cris de détresse !… Rien qu’en y pensant, je croyais les entendre encore.
Mais nous arrivions à la marge du taillis.
« Allons, camarades, au pas de course !… » cria George Merry.
Et ceux qui nous précédaient de s’élancer ensemble.
Ils n’avaient pas fait dix pas, que soudain nous les vîmes s’arrêter. Un cri contenu s’échappa de leurs lèvres. Silver bondissait derrière eux en frappant le sol, comme un forcené, de sa béquille. Et nous aussi nous fîmes halte.
À nos pieds s’ouvrait une large excavation, déjà un peu ancienne, car l’herbe repoussait dans le fond et sur les côtés. On y voyait le manche d’une bêche et les débris de plusieurs caisses. Une des planches portait en grosses lettres creusées au fer rouge le nom du Walrus, le vaisseau de Flint.
C’est clair comme le jour : nous arrivions trop tard ! La cachette avait été découverte et vidée. Les sept cent mille livres n’y étaient plus.
Et voici la carte du trésor, avec l'île du Squelette et la Longue-Vue (colline) comme repères géographiques et la croix rouge marquant l'emplacement du trésor :
Et quand la voix dans les arbres se fait entendre, on retrouve une chanson bien connue :
Tout à coup, du milieu des arbres qui se dressaient devant nous, une voix s’éleva, maigre, aiguë et chevrotante, et chanta ce refrain familier :
Ils étaient quinze matelots
Sur le coffre du mort,
Quinze loups, quinze matelots,
Yo-ho-ho ! Yo-ho-ho !
Voici toute la partie qui contient les instructions utiles :
Le courage leur revenait à vue d’œil et déjà toutes les figures reprenaient leur couleur ordinaire. En quelques secondes, ils se furent remis à bavarder, quoique s’arrêtant de temps à autre pour écouter. Bientôt, n’entendant plus aucun bruit, ils prirent leurs outils et toute la bande repartit, Merry en tête, la boussole en main pour rester en ligne droite avec l’île du Squelette. Il avait dit vrai : personne ne s’inquiétait de Ben Gunn ; mort ou vif, c’était tout un… Seul, Dick tenait encore sa Bible et jetait autour de lui des regards effarés. Mais il ne trouvait aucune sympathie chez ses camarades, et Silver le plaisanta même sur ses précautions.
« Je t’avais bien averti que tu gâchais ta Bible, lui dit-il en ricanant. Puisqu’elle n’est même plus bonne pour prêter serment, que diable veux-tu qu’en pense un esprit ?… Il s’en moque comme de ça !… »
Et il s’arrêta sur sa béquille, pour faire claquer ses gros doigts.
Mais Dick ne voulait pas être consolé. Je m’aperçus bientôt que le malheureux avait peine à se tenir sur ses jambes. Activée par la chaleur, la fatigue et l’épouvante, la fièvre, annoncée par le docteur Livesey, s’emparait manifestement de lui. Heureusement pour le pauvre diable, il faisait bon marcher sur ce plateau découvert et tapissé de mousses, où les pins, grands et petits, poussaient loin les uns des autres, mêlés à des bouquets d’azalées et de canneliers. Poussant droit au Nord-Ouest, nous nous rapprochions de plus en plus de la croupe de la Longue-Vue ; à notre gauche, ma vue s’étendait maintenant sur cette baie orientale où, la veille au matin, je m’étais éveillé tremblant et secoué dans la pirogue.
Le premier des grands arbres atteint, on releva sa position et l’on reconnut que ce n’était pas le bon. Il en fut de même du second. Le troisième s’élevait à plus de deux cents pieds de haut sur un taillis épais : c’était un véritable géant du règne végétal, qui dressait dans les airs son énorme colonne rougeâtre, surmontée d’un parasol à l’ombre duquel un bataillon aurait manœuvré à l’aise. Il devait se voir de loin, aussi bien de l’Est que de l’Ouest, en pleine mer, et il aurait certes pu être marqué sur la carte comme point de repère.
Mais ce n’était pas sa hauteur qui impressionnait le plus vivement mes compagnons : c’était la pensée que sept cent mille livres en or se trouvaient quelque part enterrées sous sa grande ombre. Cette pensée finissait par leur faire oublier toutes leurs terreurs. À mesure qu’ils se rapprochaient du but, je voyais leurs yeux s’animer, leur pas devenir plus léger et plus élastique. Silver lui-même sautillait plus vivement sur sa béquille, en grommelant contre les pierres qui gênaient sa marche ; ses narines frémissaient : il jurait comme un païen s’il arrivait qu’une mouche se posât sur sa large face ou sur son front ruisselant ; par instants, il tirait avec fureur sur ma laisse et, se retournant alors, me jetait un regard meurtrier. Soit qu’il ne se donnât plus la peine de cacher ses pensées, soit qu’elles se fissent jour malgré lui sur son visage, je les lisais comme dans un livre. En arrivant près de cet or, je le voyais bien, tout le reste était oublié : l’avertissement du docteur, comme ses promesses. Sans doute il espérait s’emparer du trésor, retrouver l’Hispaniola, s’y embarquer après avoir coupé toutes les gorges honnêtes de l’île, et s’enfuir comme il l’avait rêvé, chargé de richesses et de crimes.
Sous le poids de ces alarmes, il m’était malaisé de me maintenir au pas de ces avides chercheurs d’or ; à tout instant je trébuchais, et c’est alors que Silver tirait si rudement sur la corde et m’adressait ces regards terribles. Dick venait le dernier, accablé par la fièvre et se traînant à peine. Sa vue même ajoutait à mon malaise, et, pour comble, j’étais hanté par la pensée de la tragédie qui s’était jadis passée sur ce plateau, quand ce hideux pirate à la face bleue, celui qui était mort à Savannah en hurlant pour demander à boire, avait de sa propre main immolé ses six complices. Ce bosquet, si paisible aujourd’hui, avait donc retenti des cris de détresse !… Rien qu’en y pensant, je croyais les entendre encore.
Mais nous arrivions à la marge du taillis.
« Allons, camarades, au pas de course !… » cria George Merry.
Et ceux qui nous précédaient de s’élancer ensemble.
Ils n’avaient pas fait dix pas, que soudain nous les vîmes s’arrêter. Un cri contenu s’échappa de leurs lèvres. Silver bondissait derrière eux en frappant le sol, comme un forcené, de sa béquille. Et nous aussi nous fîmes halte.
À nos pieds s’ouvrait une large excavation, déjà un peu ancienne, car l’herbe repoussait dans le fond et sur les côtés. On y voyait le manche d’une bêche et les débris de plusieurs caisses. Une des planches portait en grosses lettres creusées au fer rouge le nom du Walrus, le vaisseau de Flint.
C’est clair comme le jour : nous arrivions trop tard ! La cachette avait été découverte et vidée. Les sept cent mille livres n’y étaient plus.
Et voici la carte du trésor, avec l'île du Squelette et la Longue-Vue (colline) comme repères géographiques et la croix rouge marquant l'emplacement du trésor :